De mal en pis
  • lun, 26/08/2013 - 01:42

Le chef de la Monusco nous avertit: «La Brigade n’est pas une solution magique»

Et si les Congolais avaient tout faux? Au tout début de cette guerre, le Président de la République avait posé un triptyque imparable. En vue de venir à bout du turmoil, trois voies sont à explorer: diplomatique, militaire, politique. Si, au plan diplomatique et militaire, les lignes paraissaient il y a peu visiblement avoir un peu migré, au plan politique, à observer attentivement les derniers développements, on est bien loin du compte. Si, lasses d’être tournées en bourrique à Kampala, les équipes congolaises d’écoute parties dans la Capitale ougandaise ont plié bagages et que dans la Capitale congolaise, partis politiques et associations diverses avançaient peu à peu vers la publication de la date de l’ouverture des Concertations nationales annoncées par le Chef de l’état l’année dernière aux groupes d’opposants qu’il avait reçus à la Cité de l’Union africaine, puis aux deux Chambres législatives réunies en Congrès lors du discours sur l’état de la Nation et, enfin, dans son allocution de fin d’année, la réponse pro-rwandaise n’a pas tardé à se faire entendre.
Une vraie pluie de bombes lâchées sur la ville martyre de Goma deux jours durant, le vendredi 24 et le samedi 25 août et ce sont des morts civiles congolaises que le Congo pleure...
Signe de faiblesse pour les pro-rwandais contraints de se manifester par des tirs désespérés ou message sans équivoque adressé au Congo et au monde que le conflit n’a pas eu une ride - qu’il est aussi intact - quoiqu’en pensent les Congolais à Kinshasa et qu’il faut finir le job politiquement? En attendant, nul ne sait de quoi demain sera fait. D’autres bombes ne sont pas à écarter. Jusqu’à la reprise par le M23 de... la ville de Goma! Les Britanniques qui en savent bien plus que quiconque dans cette région annoncent, rapporte l’Afp, que le Foreign Office (le ministère des Affaires étrangères) a ordonné le retrait dans la nuit de samedi à dimanche de tout son personnel basé à Goma «par mesure de précaution». Vers quel pays? On peut parfaitement l’imaginer. Le Monsieur Afrique du Foreign Office a fait part de son «inquiétude». «Il est vital de réduire rapidement les tensions», a-t-il déclaré, en forme d’avertissement, selon ce qu’en rapporte l’Afp.
Quand les bombes nous tombent du Rwanda et que cela est dûment certifié par tous les observateurs neutres, dans les circonstances normales, notre pays aurait dû exercer son droit de réplique en déclarant la guerre. Dans les conditions présentes, ceci est-il envisageable? En clair, dans les conditions actuelles, le Congo est-il à même de prendre le risque d’une guerre déclarée à un Rwanda surarmé et dont les troupes sont super entraînées et super motivées?
On dit qu’il n’existe pas pire commandant en chef que celui qui déclare la guerre sans être sûr de la gagner. De ce point de vue, face aux provocations, il ne faut pas s’attendre à ce que Joseph Kabila Kabange lance son armée contre des cibles au Rwanda même quand la tentation est trop forte d’exercer des représailles quand la ligne rouge est franchie...

La force du feu.
Cela peut paraître risible mais le pays a été jeté dans un tel gouffre par les régimes précédents que la seule attitude de responsabilité est aujourd’hui celle de prendre le temps de nous organiser, de prendre le temps de nous construire, de prendre le temps de construire notre armée, de prendre le temps de construire notre diplomatie. Car les guerres modernes se gagnent dans l’opinion publique.
L’effet que des actes inconsidérés peuvent avoir dans l’opinion publique internationale ne peut être effacé par personne.
Et voilà nos Concertations nationales! Si ces Concertations ne peuvent éteindre le feu dans les Kivu, au Katanga et ailleurs, quelle peut en être au fond l’utilité? Depuis que le président du Sénat Léon Kengo wa Dondo a lancé dans le public l’hypothèse d’une majorité plus ample au sortir des Concertations conduisant à la rédaction d’un programme commun de Gouvernement et à la mise sur pied d’un Gouvernement d’union nationale, le Palais du Peuple a pris feu. Sur le chemin conduisant à la mangeoire populaire, nul n’hésite. Même ceux qui hier ont fait haro sur le baudet. Voilà les BMW (Beer, Music, Wife) que sont les Congolais qui refont surface de la plus belle manière dans le registre qu’ils maîtrisent le mieux! à supposer que la cohésion - ce bien tant recherché face à une agression extérieure - soit demain au rendez-vous dans la Capitale au sein de la classe politique, si le pays n’a pas apporté les réponses nécessaires au turmoil kivutien, à quoi aura servi un partage du pouvoir à Kinshasa? Le récent exemple malien et centrafricain est tout indiqué. Contrairement à la nôtre, la classe politique de ces deux pays s’était montrée unie et rassemblée face aux djihadistes (au Mali) et aux rebelles de la Séléka (en Centrafrique). L’union sacrée en interne contre la guerre n’a rien fait face à la force du feu. Chassé du pouvoir et de Bangui, Bozizé est en France en congé dans sa famille…
En janvier 2013, la capitale Bamako au Sud du Mali n’avait pu être sauvée des forces djihadistes à ses portes dans la région de Mopti, à 500 kms au nord-est de Bamako, arrivées en convois de pick-up, que grâce à l’intervention aérienne et terrestre de l’armée française. Au Mali, les Français étaient venus se battre, gagner ou mourir. Est-ce le cas pour les hommes de la Brigade d’intervention de la Monusco, tant vantée?
Voilà que l’Allemand Martin Kobler, le représentant de Ban-ki-Moon au Congo qui ne paraît pas avoir sa langue dans sa poche, nous avertit dans les termes les plus clairs: «La brigade d’intervention de la Monusco n’est pas une solution magique». Cela ne saurait être plus clair...
En mission dans la région des Grands lacs, six sénateurs américains préconisent dimanche une solution politique au conflit kivutien. «La présence des Nations unies ici est très importante mais la solution ne viendra pas des Nations unies. Il doit y avoir une solution politique. Les Nations unies ont maintenant un nouveau leadership. Nous allons solliciter plus d’appuis pour lui mais il doit y avoir une solution entre les peuples de cette région et du Congo entier mais également avec les voisins», a déclaré dimanche 25 août à Goma le chef de délégation des sénateurs, Graham Lindsey. Cela ne saurait être plus clair...
Faut-il aller aux Concertations? Sans doute. Mais pour y faire quoi? Faut-il envisager une union sacrée des Congolais? Sans doute. Mais pour quelle finalité?
Il faut certainement écouter le M23 et ses souteneurs et répondre une bonne fois pour toutes aux questions. S’ils veulent le morcellement du Congo, la réponse est claire: ils ne l’auront pas. Sauf à nous passer dessus.
S’ils le réclament malgré tout - comme cela semble être le cas - c’est signe que les Occidentaux ne sont pas loin... Les Congolais doivent alors changer leur fusil d’épaule et savoir donner des réponses correctes. En envisageant cette guerre du Congo longue qu’avait annoncée Laurent-Désiré Kabila.

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