En démissionnant, le ministre Oly Ilunga Kalenga Tshimankinda rattrapé par des affaires, a organisé une fuite en avant
  • dim, 28/07/2019 - 10:56

KINSHASA, PARIS, BRUXELLES.
Le Soft International n°1463|VENDREDI 26 JUILLET 2019.

Oly Ilunga Kalenga Tshimankinda a-t-il organisé une fuite en avant en démissionnant de son poste de ministre de la Santé du Gouvernement démissionnaire Tshibala? Voilà qui en a tout l’air...
Alors qu’on annonce chaque jour la nomination imminente du gouvernement Ilunga Ilunkamba et que Ebola bat son plein à l’est du pays (Beni-Butembo) quand des rumeurs font état de l’arrivée de cette maladie mortelle dans la Capitale, pourquoi s’est-il précipité à remettre sa blouse?

GRAVISSIME.
Mais voilà que depuis Genève, un courrier datant du 16 juillet 2019 du Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme, lève le voile. Le ministre aurait du mal à justifier d’importants fonds reçus de cet organisme. Du coup, le Congo ne saurait prétendre à de nouveaux fonds tant que l’argent précédemment reçu n’a pas été justifié... Gravissime!
«Je suis au regret de vous rappeler que, malgré nos sollicitations répétées, aussi bien auprès de vos services qu’à travers le comité de suivi du cofinancement de l’instance de coordination nationale, nous n’avons reçu à ce jour aucune information exhaustive et nable sur les dépenses publiques effectuées dans le secteur de la santé en République démocratique du Congo en 2018», écrit Nicolas Farcy, Gestionnaire de portefeuille, Département des pays à fort impact Afrique, dans ce courrier adressé à Dr, Oly Ilunga Kalenga, ministère de la Santé publique de la République démocratique du Congo, boulevard du 30 Juin 1940 N° 4310, Commune de la Gombe, Kinshasa
République démocratique du Congo. En clair, impossible de se tromper.
Puis: «Comme vous le savez, le décaissement d’une somme correspondant à 15% des fonds alloués à la République démocratique du Congo pour la période 2017-2019, soit environ 80 millions de dollars américains, est conditionné à la réalisation par la République démocratique du Congo de ses engagements en matière de cofinancement».
Puis: «Ce sujet particulier de l’augmentation des ressources nationales est un élément important du plaidoyer politique pour la santé mondiale. En référence aux engagements pris à haut niveau en marge du sommet de l’Union Africaine à Addis-Abeba en février 2019 et au vu de la sixième reconstitution du Fonds mondial qui vise à mobiliser au moins 14 milliards de dollars américains et dont la conférence se tiendra sous le haut patronage du président de la République française les 9 et 10 octobre 2019 à Lyon, l’augmentation des dépenses sur fonds propres réalisées par les pays bénéficiaires est une exigence majeure et un levier politique Important pour convaincre les bailleurs du Fonds mondial de la nécessité de continuer nos investissements. Dans ce cadre-là, il est fort probable que la réalisation des engagements de la République démocratique du Congo fasse l’objet de toutes les attentions car elle est le deuxième pays bénéficiaire des fonds du Fonds mondial. C’est pourquoi l’absence d’information fiable et officielles ou un manquement du pays il ses engagements pourrait avoir un Impact négatif quant il la prochaine allocation de la République démocratique du Congo, qui non seulement pourrait être réduite du fait de la diminution globale des dotations en cas de levée de fonds inférieure aux objectifs, mais pourrai’ en outre diminuée d’un montant additionnel pour manquement du pays aux engagements pris. Je me permets donc de solliciter à nouveau votre appui afin de nous permettre de recevoir les informations demandées dès que possible».
Dans sa lettre de démission qui est plutôt une longue lettre de dénonciation, le docteur Oly Ilunga conteste la reprise en main de la riposte contre l’épidémie d’Ebola par la présidence de la République qui en a confié la coordination non plus au ministère de la Santé mais au patron de l’Institut national de Recherche biomédicale (INRB), le professeur Jean-Jacques Muyembe Tamfum.

GROS SOUS.
Cet ex-citoyen belge - «Dr Jim», ancien d’un hôpital bruxellois «Cliniques de l’Europe» - revient dans sa lettre sur le différend qui l’oppose à la présidence de la République. Depuis février, Félix Tshisekedi aurait, à plusieurs reprises, tenté de reprendre la main sur le dispositif anti-Ebola. Le ministre de la Santé, issu du régime sortant, parle de décret signé à son insu, de l’importance de maintenir des «lignes de commandement clairement identifiées» ainsi que du risque «de confusions et d’une cacophonie préjudiciables» à la riposte.
Plus précisément, il accuse le comité d’experts mis en place par la présidence d’avoir pris des «initiatives ayant suscité des interférences dans la conduite de la riposte». Selon son entourage, c’est notamment son rival, le professeur Jean-Jacques Muyembe, que le docteur Ilunga vise par ce commentaire. Il lui reproche d’avoir appuyé, sans son autorisation, le lancement d’essais sur un nouveau vaccin dont l’efficacité ne se serait pas avérée. Le docteur Ilunga met aussi en garde le président de la République contre le lancement d’une nouvelle expérimentation sur un deuxième vaccin.
Mais en reprenant le contrôle sur la lutte contre le virus Ebola, la présidence dit espérer donner un nouvel élan à la riposte et assurer une meilleure coordination avec l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et les autres acteurs étrangers.
En creux, c’est bien sûr la politique menée par le ministre de la Santé démissionnaire qui est mise en cause. Ce dernier est accusé de «ne pas avoir su faire sentir la présence de l’État» sur le terrain. C’est aussi l’avis du professeur Muyembe qui dit trouver «anormal» que l’épidémie dure aussi longtemps.
Tout juste nommé par le président de la République à la tête de la riposte, le patron de l’INRB assure que son objectif sera de remettre le pays aux commandes de la lutte contre le virus Ebola, avec l’appui des organisations étrangères, et pas l’inverse. Sur l’affaire du nouveau vaccin, le patron de l’Institut national de recherche biomédicale se défend en expliquant qu’il s’agissait là d’une «simple proposition» de son Institut pour faire face à une éventuelle pénurie du vaccin utilisé à l’heure actuelle.
Le virologue congolais mondialement reconnu critique en ces termes la riposte telle qu’organisée à ce jour: «Le Congo est à la dixième épidémie d’Ebola. Les neuf précédentes ont été maîtrisées par les Congolais eux-mêmes aidés par nos partenaires. Entre le Congo et l’Afrique de l’Ouest, il y avait une grande différence. Le Congo avait une expérience et les experts congolais connaissaient bien la maladie. Nos experts étaient même appelés à former leurs collègues d’Afrique de l’Ouest tandis qu’en Afrique de l’Ouest, en Guinée, au Libéria ou en Sierra-Leone, on ne connaissait pas cette maladie. Mais voici que cela dure (...) La prise en charge, dès le départ, a mal commencé! On a voulu prendre le modèle Bikoro à Équateur pour le transposer à Beni-Mangina. Or, ce sont des populations totalement différentes et Bikoro c’est en zone rurale. Dans le Nord Kivu, il s’agit des cités très peuplées. Outre cela, il y’a le facteur humain, des populations déjà traumatisées qui ont perdu confiance dans les autorités. Déparquer comme ça, avec beaucoup de matériel, avec personnel étranger énorme, cela choque. L’éradication totale ne vient pas spontanément. Il faut des stratégies. Il faut une préparation. Une équipe qui gagne on ne la change pas mais une équipe qui ne gagne pas le match deux ou trois fois, il faut la changer. Si nous ne changeons pas, nous allons tourner en rond. Il faut des nouvelles personnes, des nouveaux experts qui reprennent les choses, cesser avec une gestion politique de l’épidémie. Cela est criminel». L’ex-ministre, fils de militaire ayant participé au coup d’État contre Albert Kalonji dans le Sud-Kasaï et ex-proche de Tshitshi, a clairement failli.
ALUNGA MBUWA.

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