Décor planté
  • lun, 09/09/2013 - 17:35

«Aucune frustration, aussi justifiée soit-elle, aucun déni de droit, aussi condamnable qu’il puisse être, ne peuvent expliquer l’inaction, l’apathie, l’indifférence», avertit le Président de la République aux 700 délégués aux Concertations, appelés de façon historique à être les dignes héritiers des Pères de l’Indépendance».
Moulé dans un costume cravate noir assorti d’une chemise blanche immaculée - ce qui est la marque déposée du Chef de l’état quand il vient à s’adresser à la Nation - Joseph Kabila Kabange a prononcé samedi 7 août au Palais du Peuple un discours qui le place indiscutablement dans la lignée de ceux des Grands hommes qui ont marqué l’Histoire de leur pays.
Annoncé pour 11 heures sur les petits cartons d’invitation du présidium distribués l’avant-veille, c’est à la seconde dite, telle une montre suisse, que le Chef de l’état a fait son entrée dans la grande salle des Congrès sous des pétarades d’applaudissements au grand bonheur des diplomates qui n’avaient jamais eu de cesse de s’étonner que notre protocole soit trop souvent dépassé à chaque cérémonie officielle au point de repousser les arrivées du Président de la République.
Rien, samedi 7 septembre, n’avait pu retarder l’entrée en salle du Chef de l’état accueilli dans une standing ovation par les délégués et les invités dans une salle des Congrès pleine comme un œuf. Les 700 délégués venus du pays et de l’étranger étaient là, tout comme les représentants des corps constitués. Signe d’une logistique qui fonctionne...

«Dignes héritiers des Pères de l’indépendance».
Après une introduction du président du Sénat, Léon Kengo wa Dondo, l’un des membres du présidium qui explique que ce n’est pas son jour, mais celui du Président de la République, Joseph Kabila Kabange prend la parole. Un discours cadencé, placé dans l’histoire. 25 minutes chrono...
Dès les premiers mots, il va droit au but, enfonce l’histoire:
«Il est, dans l’histoire des états et des peuples, des moments singuliers qui, par-delà tous les clivages, testent la solidité du vouloir-vivre collectif, interpellent les consciences et exigent la mobilisation des énergies et des intelligences. Des moments qui rappellent à chaque membre de la communauté nationale qu’en contrepartie des droits qu’elle lui reconnaît, la Constitution du pays, pacte républicain par excellence, lui impose aussi des obligations auxquelles il ne peut moralement se soustraire, particulièrement la défense, même au prix du sacrifice suprême, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance nationale. Il en fut ainsi de la lutte pour l’indépendance de notre pays», déclare-t-il.
De lancer cet appel fort du cœur, historique, un vrai acte de foi, qui ne laisserait pas froid: «Aucune frustration, aussi justifiée soit-elle, aucun déni de droit, aussi condamnable qu’il puisse être, ne peuvent, expliquer l’inaction, l’apathie ou l’indifférence».
Pendant vingt jours - au plus, selon l’ordonnance présidentielle - les délégués vont engager un travail qui ne soit pas «politicien» mais «citoyen», apporter «une réponse responsable», donc «patriotique».
Une réponse qui fait d’eux, «des dignes héritiers des Pères de l’indépendance et de tous ceux qui, à un moment ou à un autre de notre histoire, ont porté haut le flambeau de la lutte pour la liberté, l’unité et la grandeur de notre pays».
Ces Concertations «se veulent un cadre de travail apaisé, transparent et sans objectif caché; un cadre de réflexion objective, hors de toute agitation et de tout affairisme politique; une manifestation éloquente de notre capacité à discuter et à décider, en toute liberté, sans ingérence extérieure, et dans le respect de la Constitution, des lois et des Institutions de la République».
«L’objectif (...) est de dégager les voies et moyens susceptibles de rétablir et de consolider la cohésion interne, en vue d’assurer la victoire sur toutes les forces d’agression, de renforcer l’autorité de l’état sur l’ensemble du territoire national, de mettre fin au cycle infernal des violences à répétition, principalement dans le Nord et le Sud-Kivu ainsi que dans l’Ituri, de conjurer toute velléité de s’associer aux tentatives exogènes de déstabilisation du pays et de planifier, ensemble, son développement socio-économique dans la paix et la concorde».
«Je souhaite de tout cœur que ces Concertations nationales soient, d’abord et avant tout, perçues et vécues comme une rencontre citoyenne, entre fils et filles d’un même pays, partageant un destin commun et déterminés à en tirer le meilleur profit collectif, non seulement pour eux-mêmes, mais également pour les générations futures».

«Ils veulent démembrer le grand Congo».
D’avertir les délégués - à travers eux, le peuple congolais, afin que nul n’en ignore rien: «La guerre qui, aujourd’hui, a pour théâtre principal les territoires de Rutshuru et de Nyiragongo, vise, en fait, à créer les conditions objectives pour le démembrement du grand Congo. Prendre conscience de la nature véritable et des enjeux de cette guerre est une condition de la victoire. Se mobiliser, s’organiser et agir en sont une autre. C’est aussi la mesure de notre patriotisme».
Puis - s’il y a encore quelqu’un qui en douterait - il rappelle la paternité de l’initiative de ces Concertations qui lui revient, à lui et à lui seul. Il en fit part lors des consultations de la Cité de l’Union africaine, aux partis et groupes parlementaires d’opposition, l’annonça le 15 décembre 2012 lors du discours sur l’état de la Nation, confirma son initiative lors du discours de la Saint Sylvestre. Puisque «conscient de la gravité de la situation sécuritaire dans la province du Nord-Kivu, de la menace existentielle qui en découle pour l’ensemble de la Nation», mais aussi fort de (ses) prérogatives de Chef de l’état, Garant du bon fonctionnement des Institutions».
S’il trace à grands traits la feuille de route des Assises de Kinshasa - les cinq thématiques 1. Gouvernance, démocratie et réformes institutionnelles;
2. économie, secteurs productifs et finances publiques;
3. Désarmement, démobilisation, réintégration sociale et/ou rapatriement des groupes armés;
4. Conflits communautaires, paix et réconciliation nationale; 5. Décentralisation et renforcement de l’autorité de l’état), il précise que rien n’est figé, que tout est ouvert, chacun ayant le loisir d’«aborder tout sujet d’intérêt général (...), en toute liberté et sans contrainte, (avec) l’immunité de parole, sous réserve du respect des lois, de l’ordre public et des bonnes mœurs, principe consacré par notre Constitution».
Puis d’en appeler «à tous ceux qui hésitent encore, à venir participer à ce forum pour y apporter leur contribution».
S’il se montre ouvert, il trace la ligne rouge qui ne saurait être franchie. Les Délégués «n’ont pas vocation à se substituer au Souverain primaire; moins encore, à remettre en cause les décisions qui relèvent du pouvoir exclusif de ce dernier même si «leur marge de manœuvre demeure importante».
Si «la situation politique, économique, sociale, culturelle et sécuritaire de notre pays a déjà fait l’objet de plusieurs réflexions, analyses, études et rapports, souvent de haute facture (lors de la Conférence nationale souveraine, des Concertations du Palais du Peuple, du Dialogue Inter-congolais et lors des débats des deux Chambres), le peuple attend de ce nouveau forum congolais, un consensus sur les pistes réalistes de solution aux problèmes majeurs auxquels sont confrontés le pays et la Nation, de manière à permettre la cohésion nationale et la consolidation de la paix, gages d’un développement harmonieux et durable.

Le Très haut et les capacités de chacun de nous.
Il s’agit «d’aider, par une réflexion sereine et responsable, à concevoir les réformes nécessaires pour mieux assurer l’intégrité du territoire et la souveraineté de l’état, garantir la sécurité des personnes et des biens, approfondir et consolider la démocratie, améliorer la gouvernance politique et sociale, et rendre la croissance économique plus forte, durable et socialement bénéfique pour nos populations».
Puis de rendre «un hommage mérité» aux Forces Armées et de sécurité (pour le courage et le sens de sacrifice «extraordinaires sur le terrain des combats»), de «renouveler son engagement et celui de toute la Nation» en faveur des populations du Kivu (il entreprendra tout, quoi qu’il en coûte, pour les sécuriser et mettre définitivement fin à leurs souffrances), de lancer un avertissement ferme en direction des rebelles («aucun effort ne sera ménagé pour que les réunions de Kampala aboutissent à la restauration de la paix et de l’autorité de l’état sur toute l’étendue du territoire national, faute de quoi nos Forces Armées assumeront ce devoir).
Et, comme il nous a habitués à des paroles bibliques (rappelons le «si vous ne croyez pas à moi, croyez au moins à mes œuvres» du mercredi 8 décembre 2010 lors du discours sur l’état de la Nation, allusion aux succès de dotation des infrastructures), samedi, le Président nous a livré le fruit de ses lectures des Saintes écritures: «Le Très haut ne tente jamais personne au-delà de ses capacités». En clair, nul ne saurait livrer ce dont il n’est point porteur...
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T. MATOTU

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