Quel Congo !
  • ven, 05/02/2016 - 02:54

Les victoires au CHAN aidant, jamais - de mémoire d’observateur - Joseph Kabila Kabange n’avait été aussi psalmodié dans la Capitale que maintenant.
Certes des marches à pied du Chef de l’Etat à travers rues et avenues de la Capitale sont légion. A la fin de chaque manifestation, Joseph Kabila Kabange a l’habitude de s’offrir un petit bain de foule.
Mais la marche triomphale qu’il a effectuée mercredi 3 février ressemble à un tour d’honneur à travers la Capitale sinon à un défi lancé à ses adversaires: «Nous avons politiquement reconquis cette ville et ce pays si tant est que nous les ayons un jour perdus». Message à qui veut/peut voir ou entendre!
On est au jeu, au foot! Les pronostics peuvent être tous vous donner grands favoris, rien n’est joué tant que le dernier coup de sifflet n’a pas retenti! En décidant mercredi 3 février peu avant le début du match Congo-Guinée d’effectuer un tour des stades municipaux en pleine érection à Kinshasa, en acceptant de laisser les services d’ordre faire venir jusqu’à lui de longs fleuves des foules kinoises en extase et, last but not least, en s’offrant sous un soleil de plomb d’interminables bains de foule à travers les communes de Kinshasa et que la chaîne publique Rtnc passe et repasse à satiété sur nos petits écrans - comme pour montrer à qui veut/peut voir ou entendre que la ville et le pays ont été reconquis - c’est comme si le Chef de l’Etat n’avait jamais eu aucun doute sur l’issue de ce match qui se disputait à deux heures de Kinshasa - à Kigali, au Rwanda sur le stade Amahoro - demi-finale du Championnat d’Afrique des Nations CHAN 2016.

DE LONGS FLEUVES HUMAINS.
De Barumbu à Matete et Bandalungwa, soit le cœur de la Capitale, Joseph Kabila Kabange, en compagnie du Premier ministre Augustin Matata Ponyo et de son directeur de cabinet Nehémie Mwilanya Wilondja, a visité trois stades municipaux que le Gouvernement, sur son instruction, érige, en voulant se faire en personne une exacte idée du niveau atteint par les travaux. Sans doute ne s’imaginait-il pas le niveau des foules, d’enthousiasme sinon d’euphorie que son passage allait drainer.
Ceux qui auraient pu se poser la question sur la popularité de Kabila ont trouvé la réponse.

SENTIMENT D’HONNEUR RETROUVE.
«Kabila Wumela» (traduction littérale: Kabila dures/Kabila demeures/Kabila restes en place) était le cri de ralliement des foules en effervescence. A dire vrai, ces scènes de liesse en disaient long sur le sentiment d’honneur retrouvé des Congolais dont l’équipe nationale Les Léopards venait quatre jours plus tôt samedi 30 janvier de se défaire, lors du quart de finale, de la vaillante équipe rwandaise des Amavubis (les abeilles) qui jouaient à domicile sur le score de 2-1. Les Congolais lui en savent gré. «C’est lui - pas un autre - qui est à la manœuvre. Nous lui en savons gré. C’est lui qui a permis cette victoire», psalmodient les Congolais avec «Kabila Wumela» donnant chaque jour qui passe comme tournant de plus en plus le dos à la manipulation politicienne. Mêmes scènes de liesse partout dans le pays. Dans les montagnes escarpées du Kivu particulièrement sensibles lorsqu’il s’agit du Rwanda, accusé d’avoir à plusieurs reprises, envahi son grand voisin occidental en lorgnant continuellement sur ses richesses naturelles, la rancune est toujours aussi dure.

«NOUS LES AVONS CHICOTES».
Au Nord-Kivu, un homme scande: «Depuis Walikale, Beni, Masisi et Rutshuru, nous avons chicoté les Rwandais. Nous les avons chicotés. Dieu, l’Eternel, a montré qu’il est Congolais», rapporte le site onusien radiookapi.net. A Bukavu, un autre Congolais accuse l’arbitre d’avoir favorisé, en vain, les Rwandais, rapporte le même site. «Dans l’ex-Province Orientale, je suis ému, rempli de joie et je ne sais comment manifester ma joie. L’arbitre n’était pas pour nous mais, c’est Dieu qui l’a confondu», commente un autre à Kisangani. C’est vrai qu’au Congo - comme partout en Afrique et dans le monde, le jeu reste un exutoire. «Le football représente beaucoup de choses. Il réunit les gens. Les Congolais oublient les problèmes, les soucis du quotidien. Il y a une passion énorme pour le foot», témoigne Robert Muteba Kidiaba, gardien de but depuis 2002 du Tout-Puissant Mazembe, qui compte 105 sélections avec les Léopards. Lors du quart de finale face aux Amavubis, plusieurs milliers de Congolais avaient franchi la frontière pour se rendre au Rwanda. Pour la demi-finale face à la Guinée, ils ont récidivé. A Goma, ville congolaise frontalière avec le Rwanda, capitale du Nord-Kivu, les services de l’immigration affirment que de nombreuses personnes continuent à traverser la frontière pour se rendre à Kigali où les Léopards allaient affronter le Syli National.

PARTOUT ROUGE-BLEU-JAUNE.
Le vice-président de la Fédération congolaise de football association (Fecofa), Donatien Tshimanga a annoncé cinq mille Congolais dans les gradins du stadium Amahoro pour pousser les Léopards à la victoire. Dans la capitale du Nord-Kivu, des écrans géants ont été installés dans différents endroits de la ville pour permettre au public de suivre ce match en direct. Certains bars et restaurants s’étaient équipés en poste de télévision pour la circonstance.
Des taximen étaient moulé de maillot de l’équipe nationale alors que d’autres ont décoré leurs visages aux couleurs du drapeau national (rouge-bleu-jaune) comme partout dans le pays. Des drapelets, chapeaux, écharpes ainsi que d’autres objets aux couleurs du drapeau se vendent dans tous les coins de la capitale. Un autocollant se vend à 1.000 FC (1, 8 USD). Une écharpe à 1.500 FC, le drapeau à 1.000 FC, une paire de lunettes à 2.500 FC, le T-shirt se négocie à 10 USD. Plusieurs conducteurs de véhicules et motos avaient attaché des autocollants, écharpes ou drapelets à leurs engins. «Nous avons des objets symbolisant la RDC: écharpes et autres pour honorer notre pays. Je suis un patriote et fier de l’être. J’ai un drapeau de la RDC pour l’amour de la RDC et de nos joueurs», explique un Kinois. Sans le dire, le Congo rêve de ce 2009 quand le pays remporta la première édition du CHAN en battant le Ghana (2-0) en finale.
T. MATOTU.


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