Des opposants déclarent rejeter l’arrêt de la Cour constitutionnelle
  • jeu, 10/09/2015 - 05:39

L’arrêt de la Cour Constitutionnelle est commenté dans tous les sens. Des opposants appellent à la démission des Hauts magistrats.

Une part de l’opposition déclare rejeter l’arrêt de la Cour Constitutionnelle. Celle qui se fait appeler «Dynamique de l’opposition» conduite par l’UNC de Vital Kamerhe, le MLC de Jean-Pierre Bemba Gombo qui comprend aussi des petites formations dirigées par des personnalités politiques souvent des élus (Jean-Claude Vuemba, Jean-Lucien Bussa Tongba, Albert Fatrice Puela, Joseph Olenghankoy, celui-ci non élu) et repousse l’offre du dialogue qu’elle-même avait demandée, a rendu publique mercredi 9 septembre au siège des FONUS, dans la commune de Kasa-Vubu, non loin du siège du Parlement, une «déclaration politique du 9 septembre 2015» dans laquelle ils disent «rejeter l’arrêt de la Cour Constitutionnelle à la suite de la requête de la CENI».
Dans ce document adressé en fac-similé à la boîte emal du Soft International, les signataires appellent «les populations des 21 provinces à démembrer d’user de l’article 64 de la Constitution pour s’opposer à toute personne qui ne serait le résultat des urnes ou à tout fonctionnaire nommé ou désigné en violation de la Constitution car sa désignation constituerait un ordre manifestement illégal auquel nul n’est tenu en vertu de l’article 27 de la Constitution».

COMMENTAIRES DIVERS.
Les signataires de cette déclaration appellent le Président de la République, les présidents des deux Chambres législatives ainsi que le procureur général près la Cour constitutionnelle faisant fonction de président du Conseil supérieur de la Magistrature de pourvoir, chacun en ce qui le concerne, à procéder au «remplacement des membres de la Cour constitutionnelle disqualifiés». Dans leurs motivations en huit points, ces opposants constatent que la Cour constitutionnelle, «après s’être déclarée incompétente (…) s’est évertuée à donner des avis consultatifs à la CENI et au Gouvernement». La Dynamique invoque «l’incompétence intellectuelle ou une mauvaise foi» qui dénotent des accointances avec «la majorité au pouvoir». Elle estime que les membres de la Cour Constitutionnelle «ayant siégé pour rendre l’arrêt critiqué se sont disqualifiés et ne peuvent plus faire partie de la Cour quand celle-ci sera sollicitée à connaître des contestations de l’opposition». Ces opposants déplorent et dénoncent «l’égarement de la Cour Constitutionnelle qui évoque insidieusement et maladroitement un cas de force majeure qui justifierait la prise par le Gouvernement des mesures transitoires, exceptionnelles et urgentes qui, de toute façon, sont de nature à énerver la population».
Il faut noter que l’arrêt de la Cour Constitutionnelle est commenté dans tous les sens. Le président de la Ligue nationale des élections libres et transparentes (Linelit), Jérôme Bonso pense que la Cour a donné «un chèque en blanc» à la Céni pour le glissement. «Le processus électoral est irréversible. On reconnaît qu’il y a des pesanteurs. C’est pourquoi legouvernement doit prendre des mesures exceptionnelles. Les élections auront bel et bien lieu. Personne n’a dit que les élections n’auront pas lieu. Il y a un petit retard mais la Ceni doit organiser ces élections», argumente Patrick-Thierry-André, président du Mouvement des réformateurs libéraux (MRL), parti de la Majorité présidentielle. Le Dép. (Majorité) Patrick-Thierry-André Kakwata ne pense pas que l’arrêt de la Cour fasse l’affaire du pouvoir. «Pourquoi ça arrangerait la majorité au pouvoir? On peut aussi dire qu’elle n’arrangerait pas le pouvoir. C’est peut être une patate chaude donnée au gouvernement», répond-t-il. Il évoque par ailleurs un problème de prévision budgétaire pour expliquer le fait que le gouvernement n’a pas décaissé les 2 millions de dollars nécessaires pour organiser l’élection des gouverneurs de nouvelles provinces. «Ces élections n’étaient pas prévues dans le budget et le problème s’est posé pendant que nous étions en vacances parlementaires», explique-t-il, promettant que le Parlement traitera cette question lors de la prochaine session qui ouvre ses portes le 15 septembre prochain.

VOIE OUVERTE.
Si le député PPRD (Maj.) Ramazani Shadari juge l’arrêt de la Cour «équilibré», son collègue de l’opposition Clément Kanku (président du Mouvement du Renouveau) se demande si l’arrêt de la haute cour ne donne pas au Chef de l’Etat l’occasion de nommer des hauts fonctionnaires à la place des gouverneurs en attendant les élections des gouverneurs. «Est-ce que la Cour constitutionnelle serait en train de donner un chèque en blanc au Chef de l’Etat pour nommer des hauts fonctionnaires pour remplacer les fonctionnaires qui ont été élus pour un mandat de 5 ans?», s’interroge-t-il. Quan à l’injonction donnée à la Céni d’organiser l’élection des gouverneurs de nouvelles provinces avant celle des députés provinciaux risque d’occasionner un glissement qui aboutirait au report des prochaines élections. «Nous pensons que la Cour ne peut pas imposer à ce qu’on organise les élections des gouverneurs dans les conditions actuelles. Ça serait cautionner le fameux glissement», estime le député. L’élu estime que l’arrêt de la Cour constitutionnelle met en lumière l’incapacité de la Céni d’organiser les élections ainsi que «l’incompétence» du gouvernement. «Nous pensons que la Cour constitutionnelle n’a fait que mettre à jour l’incapacité de la Ceni à faire son travail. L’incompétence et l’amateurisme des membres de ce gouvernement sont révélés au grand jour», soutient Clément Kanku qui pense que le démembrement des provinces qui sont passées de onze à vingt-six a été précipité. Il reste que mardi 8 septembre, la Cour constitutionnelle a ouvert la voie à un report du cycle électoral devant mener à la présidentielle de fin 2016. La Cour a ordonné dans un arrêt rendu public lors d’une audience à Kinshasa que les élections des gouverneurs des provinces nouvellement créées aient lieu «impérativement» avant le premier scrutin devant ouvrir ce cycle, en octobre. Répondant à une requête en interprétation de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), la Cour a ainsi «enjoint au gouvernement» de la RDC de doter la Céni «des moyens nécessaires pour l’organisation impérative des élections des gouverneurs [...] des nouvelles provinces avant toute élection des députés provinciaux et sur toute l’étendue de la République».
Le Chef de l’Etat a promulgué en février une loi créant 21 nouvelles provinces. Les gouverneurs et vice-gouverneurs de ces entités devaient être élus en octobre mais la Céni, face à l’impossibilité d’organiser ces élections avait choisi de saisir la Cour constitutionnelle. La Cour constitutionnelle «ordonne» aussi au gouvernement de «prendre sans tarder des dispositions transitoires exceptionnelles pour faire régner l’ordre public, la sécurité et assurer la régularité ainsi que la continuité des services publics dans les provinces concernées». La Cour ne précise pas la nature de ces mesures mais, depuis plusieurs jours dans les médias congolais, on évoque une nomination des gouverneurs et vice-gouverneurs par le pouvoir exécutif. Par ailleurs, elle «ordonne» à la Céni «d’évaluer en toute indépendance et impartialité tout le processus électoral conduisant aux élections prévues dans son calendrier global» publié en février. Aux termes de la Constitution, le président Kabila, au pouvoir depuis 2001, ne peut briguer un troisième mandat lors de la présidentielle prévue pour novembre 2016 mais il entretient le doute sur son avenir politique et ses intentions.
D. DADEI.


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